Réveil à 6h (encore) ce matin, mais cette fois-ci, je suis montée dans la voiture pour aller relâcher les chiens de vendredi (oui, ils gardent les chiens 3-4 jours post-op pour surveiller leur évolution puis les relâchent sur leur lieu de capture) et attraper ceux qui allaient être stérilisés ce matin.

J’aurais du m’abstenir, je crois… J’ai commencé à avoir le mal des transports 2 minutes à peine après avoir démarré, et ça n’a pas cessé jusqu’au retour…soit 3h dans une voiture en étant malade…pas très fraîche à l’arrivée, vous vous en doutez.

Cette « petite » balade au grand air (sic) de Darjeeling fut néanmoins instructive, à défaut d’être agréable. Je vous passerai les odeurs de fritures, de gaz d’échappements (les jolies fumées noires, un régal pour les naseaux), de poubelles, etc. qui s’enchainaient, ne faisant qu’empirer mon état…

Néanmoins, donc, ce fut instructif car je me suis rendue compte que les chiennes capturées à Dhip Dara la semaine dernière étaient vraiment très craintives par rapport aux chiens de Darjeeling, qui sont bien plus faciles à attraper dans l’ensemble. J’ai pris une petite vidéo de la capture d’une petite chienne, je la mettrai en ligne lors de mon prochain passage à Kalimpong (probablement pas avant la fin de la semaine, il n’y a pas beaucoup de travail à Kalimpong alors qu’ici ça stérilise à tour de bras). On y voit un des employés appâter la petite chienne avec des biscuits. Cette dernière arrive, toute contente (partie non filmée, j’ai enclenché un peu tard), et l’homme la caresse un peu et la prend tout simplement par la peau du cou. La chienne se recroqueville alors (elle ne doit pas être bien vieille pour avoir ce réflexe de chiot) et se laisse tranquillement transporter jusqu’à la voiture, où elle rejoint les autres chiennes précédemment capturées. Question stress, minime je dirais, mis à part la surprise pour ces chiennes de se retrouver transportées en voiture (toutes bavaient de stress), mais par rapport à un chien lambda en France qui découvre également la voiture pour la première fois, ça se vaut.

http://www.youtube.com/watch?v=SvzhWFRejHs

Bilan de la matinée, 6 relâchées, 7 attrapées, des jeunes non pubères pour la plupart.

Ci-dessous, une chienne relâchée à Chowk Bazaar.

Et quelques centaines de mètres plus loin, une chienne prête à être mise dans la cage. La photo est très mauvaise, mille excuses, mais on peut y voir que l’employé caresse la chienne avant de la prendre par la peau du cou (avec un bras sous le ventre en plus), et quelques seconde auparavant, elle le suivait en « laisse », sans montrer la moindre résistance. Décidément ces chiens sont certes dans la rue, mais vraiment bien habitués à l’Homme, aucun doute
.

Evidemment, en arrivant au refuge, je ne suis pas dans un état resplendissant (j’ai d’ailleurs du zapper les poneys de Chowrasta à cause de mon état, nous y retournerons demain). L’idée d’opérer ne se pose même pas et je file dans ma chambre sans demander mon reste, sur conseil de Catrina.

Quelques heures de repos bien mérité plus tard, je me réveille, enfin prête à démarrer une vraie journée. Manque de bol, les stérilisations sont finies depuis bien longtemps.
Après quelques heures de discussion avec Yoguesh et Catrina, notamment pour savoir si je suis réellement « fussy or not » (littéralement tatillonne, comprenez par là « chiante »). Yoguesh trouve que je suis « fussy », Catrina au contraire trouve que, pour une fois, il y a une fille au refuge « qui sait ce qu’elle veut ». Je comprends vaguement, mais Catrina pose les mots dessus, que les hommes ici n’aiment pas particulièrement les filles à fort caractère et préfèrent, même si ça reste toujours sur un ton très gentil, que les filles ne décident pas trop. Une vision un poil archaïque de la femme, mais somme toute pas très différente d’autres endroits de la planète.
Ceci est assez amusant d’ailleurs, car autant « au boulot », Yoguesh veut toujours que ce soit moi qui prenne la décision, autant dans la vie de tous les jours, il n’aime pas que je dise que j’aimerais faire telle chose tel jour, c’est trop carré et pressé à son goût (mais pas au goût de Catrina apparemment !)
Après cette conversation un peu houleuse mais néanmoins très joyeuse, Yoguesh a finalement « capitulé » et m’a carrément emmené en moto au Tibetan Refugee Self-Help Center, où j’étais déjà allée jeudi.

Cette fois-ci, le soleil était de la partie, et j’ai pu prendre, en me retournant, une belle photo de Lebong, côté Darjeeling (le refuge est de l’autre côté)

Au refuge, j’ai pris 2 belles écharpes, qui sont en réalité bien plus grandes que des écharpes (1m x 2m), mais tellement douces !

Et une très jolie chemise à col mao

A notre retour, Catrina nous apprend qu’un habitant de Lebong vient d’appeler, sa vache est couchée sur le côté et ne veut pas se relever. Chic, enfin une vache sacrée à soigner !
Subash prépare tout le matériel, et nous voila partis en voiture, direction quelques centaines de mètres plus bas… mais je n’aurais pas voulu les faire à pied !

Une fois sur place, nous voici face à la bête : une petite vache sacrée, avec son veau de 5 mois. Apparemment elle serait tombée dans un trou ce matin, ils ont du se mettre à 15 hommes pour la remonter et la porter jusqu’ici, sur ce petit matelas de branches. Depuis 3-4h elle n’a pas bougé.

Au thermomètre, température normale (sauf que je n’ai aucune idée de la température normale d’une vache en degrés Farenheit, donc je dois toujours faire « traduire » par Yoguesh), les muqueuses sont congestionnées… Je cherche le stétho… ah ben non, ils ne l’ont pas pris, bon, tant pis, on fera sans….
De toute façon, face à nos maigres moyens thérapeutiques (en gros, perfusion et IM d’anti-inflammatoire type méloxicam), il n’y a de toute façon pas grand-chose à rechercher.
Après une petite injection de méloxicam…

… je réalise un examen neurologique très sommaire, afin de voir si une lésion neurologique ne pourrait pas expliquer, en plus d’une grande léthargie, le fait que la vache ne se lève pas. A l’aide d’une aiguille, je pique donc la vache entre les onglons de chaque sabot, elle réagit aux 4 membres et au bout de la queue (qu’on aurait pu croire cassée), donc tout va bien de ce côté-là a priori.

Nous perfusons donc la vache en suspicion d’acidose avec un soluté salin classique et un peu de dextrose (un sucre facilement métabolisable). Malheureusement la clinique n’est pas vraiment équipée pour traiter le bétail, donc c’est à coup de flacons de 500ml que nous injecterons, patiemment, les 2 petits litres de solutés. Pas génial comme quantité étant donné le volume d’une vache, mais toujours mieux que rien.

La tubulure n’étant pas non plus faite pour injecter des solutés à la vitesse qu’on attendrait chez une vache, la perfusion des 2 litres dure une bonne demi-heure, durant la quelle nous avons tranquillement le temps de boire un thé ! Je crois d’ailleurs que c’est la première fois que je vois un thé assise à côté d’une vache en cours de perfusion !
Finalement, les muqueuses sont revenues presque normales, nous tentons de relever la vache, qui ne se mettra qu’en position sternale. Tant pis, nous ne la brusquerons pas plus, elle se remet à manger, c’est déjà ça.

Je conseille alors au propriétaire de bien veiller à donner à boire à sa vache et à manger, pour qu’elle ne soit surtout pas déshydratée par impossibilité d’accès à l’eau, et de rappeler le lendemain pour donner des nouvelles. Quand nous reviendrons, nous en profiterons pour vermifuger le veau, qui a un ventre énorme perché sur 4 allumettes !

Puis c’est le retour à la clinique, à la tombée de la nuit… et je place enfin mon cher petit drapeau pour qu’il soit en vue de la rue. Tout le monde a rigolé quand j’ai entamé fièrement la Marseillaise en plaçant le drapeau, mais après leur avoir traduit les paroles, ça les a fait d’un coup un peu moins rigoler ! ils trouvent ce chant « un peu violent », tiens donc !

14 juin 2010, une vache ! (enfin !)

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